Pour la sélection des candidats aussi, le mieux est l'ennemi du bien
Trop en demander aux candidats n’est pas gage d’une validité de la procédure de passation, comme l'a appris à ses dépens le ministère de la Défense.
Pour un marché de travaux, où les candidatures de groupements sont fréquentes, le ministère de la Défense avait défini une procédure de notation pour la sélection des candidatures très claire. Les groupements candidats étaient notés « sur une base de 100 points, dont 60 points pour le critère relatif aux références, eux-mêmes répartis en 16 points pour les références en matière de construction, 12 points pour les références de l'architecte, 12 pour celles du bureau d'études techniques, 10 pour celles de l'équipementier, 10 pour l'entreprise de maintenance ; [...] le règlement de la consultation précisait le nombre et la nature des références demandées et le nombre de points susceptibles d'être accordés à chaque référence ».
Un candidat évincé s’est ému de cette clarté apparente et a obtenu l’annulation de la procédure devant le juge du référé précontratuel, qui requalifia cette notation de sous-critères pondérés.
Le Conseil d’État, saisi en cassation, rejette cette interprétation du juge du fond et casse sa décision. En revanche, il en profite pour statuer au fond afin de s’assurer que la procédure de passation ne soit pas, par la suite, validée. Si le principe de la notation est bon, tel n’est pas le cas des documents demandés pour fonder cette notation. En effet, le pouvoir adjudicateur avait demandé « la production d'une note présentant la composition de l'équipe dédiée au projet ainsi que l'organisation mise en place pendant la phase de conception et pendant les phases de réalisation, de mise en service et de maintenance de l'ouvrage, avec la définition des rôles et responsabilités des membres de ces équipes et de leur méthodologie de travail ». Bien que louable, cette demande est contraire à la liste exhaustive de documents nécessaires pour candidater, inscrite dans l’arrêté du 28 août 2006.
En imposant ces documents, ce qui est susceptible de léser le candidat ainsi évincé, la procédure doit être annulée. Si le pouvoir adjudicateur doit être un zélé serviteur des principes fondamentaux de la commande publique, il ne doit jamais aller plus loin, sous peine de les détourner de leurs buts… et de voir son travail être anéanti par le juge.
Source :