Comment concilier droit des marchés publics et respect de l'environnement ?
Si les textes européens et français mettent de plus en plus en avant la notion d'« achat public durable », la pratique prouve que le critère environnemental reste avant tout subordonné au principe de non-discrimination dans la commande publique. En témoigne l'arrêt du 21 janvier 2010 de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) concernant une affaire opposant la Commission à la République fédérale d'Allemagne.
L'Allemagne a été condamnée par la CJUE pour avoir « passé un marché public de services relatif à l'élimination de bio déchets et de déchets verts sans recourir à une procédure de passation avec appel d'offres européen ». Argument avancé par l'Allemagne : l'articulation entre le droit des marchés publics (directive 92/50) et le droit des déchets pose problème car le premier ferait « obstacle à ce que le traitement et l'élimination des déchets aient lieu aussi près que possible du lieu de leur production ».
Faux, répond la CJUE : la directive 92/50 n'empêche pas le pouvoir adjudicateur de prévoir dans son marché une élimination des déchets aussi proche que possible de leur lieu de production. La Cour rappelle que la procédure d'appel d'offres reste obligatoire pour tout marché public : les dispositions de la directive 92/50 prévalent sur les arguments environnementaux.
Hasard ou coïncidence ? Le jour où la CJUE publiait son arrêt, en France, le ministère de l'Économie répondait à une question parlementaire écrite, sur le même sujet. En cause cette fois : la conciliation des principes du Grenelle de l'environnement avec le Code des marchés publics. Le sénateur Gérard Bailly s'interrogeait sur la possibilité de prendre en compte la proximité géographique d'une entreprise comme critère d'attribution d'un marché, au motif que les émissions de CO2 seraient réduites.
Là encore, la réponse est non. Aucune priorité ne peut être accordée à une entreprise plus proche, car cela irait à l'encontre du principe d'égalité dans la commande publique. Difficile alors de promouvoir les achats publics durables ? Pour le Conseil des communes et régions d'Europe (CCRE), ce n'est pas la priorité. Il faut d'abord respecter « le principe de l'autonomie locale et régionale ».
À l'occasion de son audition devant le Parlement européen le 27 janvier, le représentant du CCRE, Robert Hann, a plaidé pour une révision des directives européennes sur les marchés publics. Parmi ses recommandations : faire en sorte que « les actions communautaires en rapport avec des achats durables, socialement responsables, innovants, etc. » restent « volontaires », et « permettre aux collectivités locales et régionales de déterminer leurs propres priorités en matière d’achats ».
En matière de commande publique, l'environnement reste donc une question de priorité.
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