Les collectivités sont tenues d'honorer le montant minimum prévu dans un marché
Une collectivité qui n'honore pas le montant des commandes prévu dans un marché peut voir sa responsabilité engagée. C'est ce qu'a répondu le ministère de l'Intérieur à la question posée par la députée Marie-Jo Zimmermann, le 23 avril dernier. Les pouvoirs adjudicateurs doivent donc être prévoyants dans la passation de leurs marchés publics.
Dans sa question, la députée citait le cas d'une commune ayant passé un marché de prestations de services juridiques d'un montant total de 60 000 euros. « Pour des raisons diverses, la collectivité ne peut honorer les termes du marché de sorte que ses commandes de prestations sont très inférieures à ce montant et n’excéderont pas au total 10 000 euros », indique-t-elle au ministère. Celui-ci rappelle que « dans la mesure où un pouvoir adjudicateur s'engage, dans le cadre d'un marché public, à commander des fournitures ou des services pour un minimum déterminé, le cocontractant a droit à ce que ce minimum de commandes soit honoré ».
Si le minimum de commandes n'est pas assuré, le cocontractant a le droit à une indemnisation. C'est en tout cas ce que le juge affirme depuis l'arrêt Ville d'Antibes de 1991. En l'espèce, la ville d'Antibes avait passé un marché à bons de commande prévoyant un montant minimal de 150 000 francs à l'époque. Or, le montant des commandes passées n'avait finalement atteint que 32 737 francs. Le Conseil d’État avait alors estimé que le préjudice subi consistait « dans la perte de la marge bénéficiaire qu'aurait dégagée en l'espèce l'exécution du montant minimal des travaux prévu au marché ». Le cocontractant peut donc être indemnisé de la différence entre ce montant minimum prévu et le montant des prestations effectivement réalisées. Attention : ce n'est donc pas parce que le pouvoir adjudicateur estime qu'il n'a pas besoin de l'ensemble des prestations prévues au contrat qu'il peut se dispenser de rémunérer son cocontractant !
Le cahier des clauses administratives générales des marchés publics de fournitures courantes et de services (CCAG FCS) réaffirme bien que, dans le cas d'un marché à bons de commande comportant un montant minimum, lorsque « le total des commandes du pouvoir adjudicateur n'a pas atteint le minimum fixé par le marché, en valeur ou en quantités, le titulaire a droit à une indemnité, égale à la marge bénéficiaire qu'il aurait réalisée sur les prestations qui restaient à exécuter pour atteindre ce minimum ».
En période de vaches maigres pour les collectivités territoriales, la réponse du ministère de l'Intérieur appelle les pouvoirs adjudicateurs à la prudence. Elle rappelle l'importance de bien définir ses besoins au moment de la rédaction d'un marché public, afin d'éviter les mauvaises surprises financières. Plus les besoins seront évalués avec précision, moins le risque d'erreur et de sur-évaluation des commandes est élevé. Les collectivités peuvent trouver dans le guide des prix, publié par la direction des Affaires juridiques du ministère de l'Économie, de précieux conseils destinés à les aider à définir correctement les prix ainsi qu'un chapitre consacré à l'évaluation de leurs besoins.
À noter enfin qu'il existe des circonstances particulières lors desquelles le prix prévu dans le marché peut être revu, qu'il s'agisse de sujétions techniques imprévues, de force majeure, de bouleversements de l'économie du marché ou d'événements imprévisibles.
Dans tous les cas, pour régler un litige concernant le paiement de prestations, le ministère de l'Intérieur invite les pouvoirs adjudicateurs et leurs cocontractants à faire appel à un protocole transactionnel. Le titulaire du marché devra alors fournir les justificatifs nécessaires à l'évaluation de son préjudice.
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