L'investissement public local est-il à la merci des coupes budgétaires ?

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Les acheteurs locaux pourront-ils maintenir leur rythme d’investissements ? La hausse modérée de l’endettement local, malgré la hausse importante de l’encours de dette pour les communes et les communautés, offre-t-elle des promesses de sources de financement ?

Les perspectives des finances publiques locales posent de nombreuses questions et incertitudes, accentuées par le programme pluriannuel pour les finances publiques ainsi que la loi de finances pour 2015.

La situation macro-économique de la France reflète la situation de stagnation qui touche les pays de la zone euro : faible croissance et faible inflation vont de concert à cause d’une crise financière entamée en 2008 par les banques et qui se poursuit depuis quelques années sous la forme d’une crise des finances publiques. Le non-respect des règles de la zone monétaire européenne tant sur le plan de l’endettement (qui devrait être inférieur à 60 % d’une année de produit intérieur brut) que du déficit budgétaire (qui ne devrait pas dépasser 3 % du PIB) conduit à une politique budgétaire très restrictive par l’État avec des conséquences fortes pour les collectivités locales. Selon le programme établi pour les cinq prochaines années (jusqu’en 2019), la dépense publique progressera, en valeur, à un rythme de 1,4 % en 2014, puis 1,1 % en 2015.

Ce ralentissement est la conséquence du plan d’économie prévu pour l'État et ses établissements publics (19 milliards d'euros en trois ans, dont 7,7 dès 2015), pour les collectivités locales à hauteur de 3,7 milliards d'euros par an ainsi que pour les établissements de santé pour 10 milliards d'euros, dont 3,2 milliards dès 2015.

Les chiffres du projet de loi de finances pour 2015 traduisent la même orientation : les prélèvements opérés sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales reculent de 6,36 % pour atteindre 50,7 milliards d’euros. Parmi ses transferts, la dotation globale de fonctionnement baisse de 8,76 % pour s’établir à 36,6 milliards d’euros… ce qui ne permet pas d’atteindre les 3,7 milliards d’euros prévus, mais « seulement » 3,514 milliards.

En revanche, est prévue la création d’une dotation de soutien à l’investissement local, d’un montant de 423 millions d’euros versée en trois fractions pour les communes, qui bénéficie des dotations de solidarité rurale et urbaine ainsi que de la hausse du fonds de compensation de la TVA grâce au réhaussement du taux. Le montant de la dotation globale de construction et d’équipement scolaire est sanctuarisé à 2,686 millions d’euros.

Au regard des chiffres de la Banque postale, la dynamique est similaire. Les recettes courantes continuent à progresser mais l’épargne brute (différence entre les recettes et les dépenses de fonctionnement, intérêt de la dette inclus) est en recul de 2,2 milliards d’euros. Dans la mesure où l’épargne brute finance à plus des deux tiers l’investissement local, la relation de cause à effet entre la baisse de l’épargne des collectivités et leurs dépenses d’investissement est très nette. Cette tendance est sans doute la plus inquiétante car elle pèse sur la santé financière des personnes publiques depuis 2013, voire même depuis 2012 si les intérêts de la dette sont exclus du calcul. Fonds de roulement et autofinancement des collectivités reculent par voie de conséquence de ce manque d’épargne brute.

Corrélativement, l’endettement des collectivités est en hausse de plus de 4 milliards d’euros pour atteindre 173,4 milliards en 2014 selon les prévisions de la Banque postale, s’inscrivant dans une tendance longue puisque depuis 2004, selon les mêmes chiffres, la dette des administrations publiques locales a augmenté de 159,38 %.

Cette augmentation n’est toutefois pas due à une « boulimie » d’emprunts par les acteurs locaux, puisque les montants d’emprunts nouveaux ont diminué depuis 2012 de 1,6 milliard d’euros, mais plutôt à un effet d’inertie par rapport aux anciens emprunts.

La baisse des dépenses d’investissement entamée en 2014, ce qui est classique en année électorale, devrait ainsi se poursuivre. Les estimations de la Banque postale font état d’une baisse de 10,2 % des investissements des communes et de 5,6 % des investissements des intercommunalités pour cette année. Année post-électorale, 2015 devrait toutefois bénéficier de dépenses d’investissement plus importantes : en 2009 par exemple, l’investissement a connu un rebond très net (55,1 milliards d’euros contre 53,2 en 2008 et 51 en 2010), traduisant les engagements de campagne des nouveaux élus.

La baisse de l’investissement local pourrait être moins marquée que prévue, mais la part d’autofinancement risque de continuer à baisser au profit d'une hausse des ressources externes (dettes, obligations, partenariats public-privé...).

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