Signature des offres : tout change, pour que rien ne change

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La célèbre phrase du prince Salina dans Le guépard, roman de Guiseppe di Lampedusa n’est, certes, pas tout à fait exacte (« si nous voulons que tout reste comme tel, il faut que tout change ») mais l’esprit en est le même. Par une réponse ministérielle à une question du sénateur Jean-Claude Carle (Haute-Savoie – LR), le ministère de l’Economie a reconnu que les acheteurs publics peuvent continuer à exiger des candidats qu’ils signent leurs offres, les engageant à la respecter lors de la signature !

En l’état antérieur du droit, sous l’empire du Code des marchés publics, l’offre était présentée par le candidat sous la forme d’un acte d’engagement (CMP, art. 48), qui était signé (CMP, art. 11). Une telle disposition permettait d’imposer le principe de l’intangibilité de l’offre pendant la période de la consultation, au terme de laquelle le pouvoir adjudicateur ayant attribué le marché, signait de son côté l’acte d’engagement. Selon le mécanisme contractuel de principe, l’acceptation rejoignant l’offre, le contrat était ainsi conclu.

Une telle procédure a été qualifiée de trop lourde par le ministère de l’Economie lors de la rédaction du décret d’application de l’ordonnance no 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics. En effet, non seulement cela mettait en péril les candidats qui ne connaissaient pas la règle (l’offre étant alors irrégulière) mais cela risquait de peser sur la capacité des PME notamment de répondre valablement à ces marchés lorsque la signature électronique était nécessaire.

Le pouvoir réglementaire a ainsi supprimé toute disposition imposant la signature de l’offre, sous la forme d’acte d’engagement, dans le décret no 2016-360 du 25 mars 2016… laissant entrevoir un déséquilibre au désavantage cette fois-ci non pas des PME, mais bien des pouvoirs adjudicateurs ; l’intangibilité des offres est mise en péril par l’absence d’engagement des candidats à les faire demeurer pendant la période d’examen !

Interrogé à cet égard par le Sénat, le ministère de l’Economie reconnait la liberté des pouvoirs adjudicateur pour qu’ils se sécurisent : « aucune disposition des textes de transposition ne s'oppose toutefois à ce que l'acheteur, s'il le souhaite, impose aux soumissionnaires la signature de leur offre à condition de mentionner cette exigence dans le règlement de la consultation ou dans l'avis de publicité ».

Il est à noter que, dans tous les cas, le nouveau droit des marchés publics impose que le candidat signe l’acte d’engagement lorsqu’il a été choisi par le pouvoir adjudicateur (D. no 2016-360, art. 101 et 102), y compris au moyen de la signature électronique.

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