Transfert de personnel : la CJUE tranche en faveur des collectivités
C'est une bonne nouvelle pour les collectivités locales. La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a jugé qu'une collectivité, qui résilie un contrat avec son prestataire pour exercer elle-même l'activité, n'est pas obligée de réembaucher le personnel de ce dernier.
Pour rendre son arrêt le 20 janvier, la CJUE s'est penchée sur la directive 2001/23/CE, relative au maintien des droits des travailleurs, en cas de transfert d'entreprise. Ce texte a pour objectif de protéger les travailleurs des États membres, en cas de transfert, de cession ou de fusion d'entreprise. Selon la directive, le transfert, la cession ou la fusion d'une entreprise ne constitue pas un motif de licenciement valable. Mais le texte doit-il s'appliquer à une collectivité qui choisit de reprendre à son compte une activité précédemment exercée par une société extérieure ? C'est l'objet de l'affaire C-463/03 jugée par la Cour.
Retour sur les faits. La municipalité de Cobisa avait conclu en 2003 un contrat avec une société nommée CLECE pour le nettoyage d'écoles et de locaux municipaux. La commune annonce la résiliation de ce contrat au 31 décembre 2007. La société CLECE informe alors une employée, la femme de ménage, qu'elle fait désormais partie du personnel de Cobisa, puisque cette dernière prend en charge l'activité et invoque la convention collective du secteur du nettoyage des bâtiments et locaux.
Or, la municipalité n'autorise pas cette employée à travailler pour elle, car elle a recruté du personnel pour assurer l'activité précédemment gérée par CLECE. De son côté, CLECE ne propose aucun autre poste à l’intéressée, qui forme donc un recours contre la société CLECE ainsi que contre la commune de Cobisa pour licenciement abusif. Condamnée par la juridiction espagnole à réintégrer la requérante dans l'entreprise et à l'indemiser, la société CLECE a fait appel du jugement.
La CJUE est finalement saisie d'une question préjudicielle lui demandant de se prononcer sur l'applicabilité de la directive 2001/23/CE dans une telle situation. Il s'agit de déterminer si elle correspond à un transfert d'activité au sens de la directive, c'est-à-dire au transfert « d'une entité économique maintenant son identité, entendue comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d'une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire ».
La CJUE s'attache plus particulièrement à la question du « maintien de l'identité » de l'entité économique transférée, condition essentielle, selon elle, pour faire entrer le transfert de l'activité reprise par la municipalité de Cobisa dans le champ de la directive 2001/23/CE. « Or », estime la Cour, « la seule circonstance que l’activité exercée par CLECE et celle exercée par l’Ayuntamiento de Cobisa soient similaires, voire identiques, ne permet pas de conclure au maintien de l’identité d’une entité économique ». La collectivité n'aurait été contrainte d'embaucher la requérante, que si elle avait repris la majorité des salariés de l'entreprise CLECE.
Il ne s'agit donc pas d'un transfert au sens de la directive 2001/23/CE, la collectivité n'a pas d'obligation vis-à-vis de la requérante. Cet arrêt va sans doute rassurer les gestionnaires publics sur leur choix d'internaliser à nouveau certaines de leurs prestations.
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