Absence de délai supplémentaire pour l’exécution de travaux supplémentaires et modération des pénalités
Le Conseil d’État a rendu, le 20 juin 2016, un arrêt dans lequel il précise les modalités selon lesquelles les demandes de travaux supplémentaires par ordre de service peuvent être intégrées à un marché public sans délai supplémentaire.
En l’espèce, la communauté de l'agglomération rouennaise a confié aux sociétés Eurovia Haute-Normandie et Colas Ile-de-France Normandie, un marché ayant pour objet la fourniture et la mise en œuvre de la structure de la voirie du programme du transport est-ouest rouennais (TEOR).
Le décompte général et définitif notifié au groupement d'entreprises le 10 décembre 2007 incluait des pénalités de retard dans l'exécution du chantier pour la période allant du 19 janvier au 21 mai 2001. Les sociétés Eurovia Haute-Normandie et Colas Ile-de-France Normandie ont demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner la communauté de l'agglomération rouennaise à leur verser des sommes correspondant au solde du marché. Par un jugement du 14 mai 2009, confirmé par un arrêt du 19 octobre 2010 de la cour administrative d'appel de Douai, le tribunal administratif de Rouen a, en retenant la date du 9 février 2001 comme date d'achèvement des travaux, réduit le montant de ces pénalités.
Par une décision n° 345137 en date du 16 mai 2012, le Conseil d'État a annulé l'arrêt et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Douai. Les sociétés Eurovia Haute-Normandie et Colas Ile-de-France Normandie se sont pourvues en cassation contre l'arrêt n° 12DA00861 du 10 janvier 2014 par lequel la cour administrative d'appel de Douai avait annulé le jugement du tribunal administratif de Rouen du 14 mai 2009 en tant qu'il les avaient déchargées des pénalités de retard pour la période du 10 février au 21 mai 2001 et avait rejeté leurs conclusions tendant à la décharge de ces pénalités.
Le Conseil d’État rappelle, dans un premier temps, que le maître d'ouvrage a ordonné, par un ordre de service en date du 17 novembre 2000, la réalisation des travaux supplémentaires, sans accorder de délai supplémentaire aux constructeurs. Tout en précisant que les travaux supplémentaires n’avaient pas à être prévus par voie d’avenant au marché, dans la mesure où ils correspondaient à ceux prévus dans les lots confiés aux entreprises et qu’ils n’avaient pas conduit à un dépassement du montant prévu par le marché.
Par ailleurs, la haute juridiction administrative précise que le retard dans l’exécution des travaux n’est imputable qu’aux seules entreprises. En effet, les travaux n’ont débuté que le 22 janvier 2001, malgré un ordre de service datant du 17 novembre 2000. Il n’est pas non plus établi que les retards liés à des aléas indépendants de la volonté des entreprises n’auraient pas pu être compensés dans le délai global d’exécution en intervenant dans d’autres secteurs. Enfin, le retard dans la mise en œuvre des enrobés est imputé aux entreprises qui n’ont pas pris à temps les mesures nécessaires pour solliciter les arrêtés de restriction de circulation afin d’effectuer les travaux.
Les juges du palais royal apportent également des précisions relatives à la modération du montant des pénalités de retard. En effet, selon les sociétés requérantes, le montant des pénalités appliquées représentaient approximativement 26 % du montant total du marché tel qu'il ressortait du décompte général. Ainsi, la cour administrative d’appel a dénaturé les pièces du dossier en considérant que les pénalités laissées à la charge du groupement représentaient seulement 4 % du montant du marché, son arrêt est donc annulé.
Source :