Contestation de l’attribution d’un marché à une société d’intérêt collectif agricole d’habitat rural : candidats évincés, attention aux écueils !
En l’espèce, la commune de Sens avait attribué un marché de maîtrise d’œuvre portant sur la réhabilitation d’un centre social. À la suite de l’attribution du marché à la société d’intérêt collectif agricole d’habitat rural (SICAHR) de l’Aube, plusieurs membres d’un groupement d’architectes qui avait été évincé contestèrent la validité du marché et demandèrent au juge administratif de les indemniser de leur manque à gagner et des frais inutilement engagés par eux en vue de soumissionner. Leurs demandes furent toutefois rejetées par le tribunal administratif de Dijon. Qu’importe, ces derniers choisirent d’interjeter appel.
Ceux-ci se prévalaient notamment de la circonstance que l’offre de la SICAHR de l’Aube avait été sélectionnée alors même que celle-ci était anormalement basse et aurait dû, à ce titre, être rejetée ou du moins faire l’objet de la procédure de vérification prévue à l’article 55 du Code des marchés publics. De manière à démontrer le caractère anormalement bas de cette offre, les requérants se prévalaient notamment de la circonstance que le prix de l’offre de la SICAHR était manifestement sous-évalué au regard de la valeur estimée du besoin par le pouvoir adjudicateur et du prix des offres des autres candidats.
En outre, ceux-ci se prévalaient d’une distorsion de concurrence tenant au statut et au régime fiscal de la SICAHR de l’Aube par rapport aux sociétés du secteur privé. Selon les requérants, cette société disposait en effet d’avantages découlant des ressources et des moyens qui lui étaient attribués au titre de la mission de service public qui lui incombait en application des dispositions de l’article L. 531-1 du Code rural et de la pêche maritime. Cette situation conduisait donc à une méconnaissance des règles de concurrence imposées par le Code des marchés publics.
La cour administrative d’appel de Lyon rejeta cependant l’ensemble des moyens soulevés par les requérants.
D’une part, et comme cela ressort d’une jurisprudence constance de la haute juridiction administrative (voir, en ce sens, CE, 3 nov. 2014, Office national des forêts, n° 382413), le seul écart de prix entre le prix proposé par la société attributaire du marché et le prix proposé par les autres candidats ainsi que l’estimation du prix du marché réalisé par la commune de Sens n’est pas de nature à établir à lui seul le caractère anormalement bas de l’offre de la SICAHR de l’Aube. En effet, seul un prix manifestement sous-évalué et susceptible de remettre en cause la bonne exécution du marché est de nature à caractériser l’existence d’une offre anormalement basse.
D’autre part, les requérants n’avaient pas apporté suffisamment de précisions de manière à démontrer que la SICAHR de l’Aube aurait bénéficié des moyens et des ressources qu’elle tient de ses missions de service public pour déterminer le prix de son offre. Dans ces conditions, ce second moyen relatif à la méconnaissance des règles de concurrence par la commune devait donc être également rejeté.
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