Exécuter un marché n'est pas une option pour un sous-traitant !
Si les cocontractants de l’administration ont des droits particuliers, ils ont aussi des devoirs. Le poids de ceux-ci ne peut être mis de côté, même pour les sous-traitants, en particulier lors de l’exécution d’un marché de travaux. Par un arrêt du 30 décembre 2014, la cour administrative d’appel de Douai a illustré l’équilibre entre l’obligation générale d’exécution et les droits ouverts aux titulaires et sous-traitants.
L’affaire porte sur un marché de travaux dans une zone bombardée lors de la Seconde Guerre mondiale. Le pouvoir adjudicateur demande, par ordre de service, de débuter les travaux ; les sous-traitants refusent d’exécuter au motif que le déminage n’a pas été effectué et qu’ainsi les risques étaient trop importants. Le titulaire demande de nouveau la réalisation des travaux et essuie un nouveau refus. Les marchés de sous-traitance sont résiliés par le titulaire.
Les entreprises sous-traitantes recherchent à être indemnisées en invoquant une faute du pouvoir adjudicateur lors de la conclusion du contrat en cela que les conditions de sécurité n’étaient pas assurées. Le juge écarte ce raisonnement en expliquant qu’il leur appartenait « soit de refuser de signer le contrat de sous-traitance, si elles estimaient que les modalités d'exécution des opérations de dépollution pyrotechnique n'étaient pas régulières ou présentaient des conditions de sécurité insuffisantes, soit, le cas échéant, d'exiger des compléments d'information sur ces point ».
Les sous-traitants demandent à être payés en invoquant leur droit au paiement direct. Le juge relève qu’en cas de résiliation, le sous-traitant à droit au paiement direct des prestations réalisées avant la résiliation, y compris lorsque ces prestations relèvent des travaux indispensables et des sujétions imprévues (à la triple condition d’être extérieurs aux parties, inévitables et de bouleverser l’économie du contrat). En l’espèce, les sous-traitants n’ont rien réalisé : ils n’ont pas droit à un paiement.
Au-delà du bon sens de cette décision apparaît le caractère doublement protecteur des marchés publics lors de leur exécution. Protecteur, le marché l’est pour le pouvoir adjudicateur qui est assuré de la réalisation des travaux (comme en l’espèce, puisque le titulaire a fait appel à un nouveau sous-traitant). Protecteur, il l’est également pour les entrepreneurs, titulaires comme sous-traitants : certes, ils doivent réaliser tout ce qu’on leur demande, mais si cela nécessite des travaux supplémentaires ou de surpasser des sujétions imprévues, alors ils ont droit à en être indemnisé in integrum… ce qui couvre aussi une part de profit financier.
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