Le transfert de compétences entre personnes publiques n’est pas un marché public !
Un transfert de compétence entre personnes publiques n’est pas un marché public, mais un acte d’organisation interne propre à chaque État membre de l’Union européenne qui, conformément à l’article 4§2 du Traité sur l’Union européenne (TUE), se trouve exclu du champ d’application du droit de l’Union. Tel est du moins ce que vient de confirmer la Cour de justice de l’Union européenne dans le cadre d’une question préjudicielle relative à un litige opposant la société Remondis et la région de Hanovre.
En l’espèce, la région de Hanovre et la ville de Hanovre avaient souhaité réorganiser leurs services d’enlèvement et de traitement des déchets à travers la création d’un syndicat, lequel devrait à la fois satisfaire les besoins propres et communs de ces deux collectivités. Å cette fin, et conformément à la législation allemande, le syndicat s’était vu attribuer l’ensemble des compétences des collectivités membres en matière de gestion des déchets.
La société Remondis avait toutefois saisi le juge allemand sur la légalité de ce transfert de compétences. Selon cette société, un pareil transfert constituait en effet un marché public au sens du droit de l’Union européenne, et devait donc être annulée pour non-respect des règles de publicité et de mise en concurrence. À cet égard, la société Remondis soulignait notamment qu’au regard du chiffre d’affaires réalisé par ce syndicat avec des tiers distincts de ses collectivités membres, celui-ci ne pouvait bénéficier de l’exception in house (CJCE, 18 nov. 1999, aff. C-107/98, Teckal). À l’inverse, la région de Hanovre soutenait que la création du syndicat et le transfert de compétences à son profit ne relevaient pas du champ d’application du droit des marchés publics, ces actes ayant été fondés sur une décision statutaire et non sur un contrat ou un accord administratif. Dans ce contexte, le juge allemand prit donc la décision de surseoir à statuer afin d’interroger la CJUE sur la distinction existant entre un marché public et une mesure d’organisation interne propre à chaque État membre.
Tout d’abord, les juges de l’Union commencent par bien établir la distinction entre un marché public et un transfert de compétences entre autorités publiques. À cet égard, il est notamment rappelé que la notion de marché public suppose et vise des opérations d’acquisition à titre onéreux par le pouvoir adjudicateur. Or, selon la Cour, un acte par lequel une autorité publique choisit de transférer ses compétences ne vise pas des acquisitions à titre onéreux, celui-ci va bien au-delà, puisqu’il s’agit en effet d’une mesure de réorganisation interne d’un État membre qui se trouve exclu du champ d’application du droit de l’Union.
Toutefois, les juges de l’Union rappellent ensuite les conditions auxquelles doivent satisfaire les transferts de compétences entre personnes publiques afin de bénéficier de la qualification de mesure d’organisation interne à chaque État membre. Le transfert de compétences doit en effet porter sur les responsabilités liées à la compétence transférée, mais également sur les pouvoirs qui sont le corolaire de celle-ci, notamment en matière financière. Autrement dit, la personne publique nouvellement compétente doit exercer ses compétences de manière autonome et sous sa propre responsabilité. À noter tout de même que les autorités publiques anciennement compétentes peuvent toujours exercer un certain droit de regard sur l’autorité nouvellement compétente, comme par exemple par le biais d’un organe délibérant au sein de cette dernière. Toutefois, celui-ci ne peut avoir une influence sur les modalités concrètes d’exécution qui relèvent des compétences transférées.
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