Marché surfacturé et passé sans publicité ni mise en concurrence n’est pas à payer !
La cour administrative d’appel de Bordeaux a rendu, le 4 février 2016, un arrêt dans lequel elle précise les fondements sur lesquels la responsabilité de la commune peut être engagée en présence d’un marché passé dans des conditions illégales.
En l’espèce, le maire de la commune de Goyave a donné son accord, sans qu’aucun marché ne soit formellement conclu par la commune, à la livraison par la société P. de diverses fournitures. La société P. a sollicité le paiement de factures que la nouvelle municipalité a refusé d'acquitter. La société P. a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la commune à lui verser ladite somme. Par un jugement en date du 28 février 2014, le tribunal a partiellement fait droit à la demande de la société. La commune relève appel dudit jugement.
La cour administrative d’appel revient, dans un premier temps, sur les règles applicables lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l’exécution du contrat qui les lie. Elle rappelle également, en s’appuyant sur les articles L. 2121-29 et L. 2122-21 du Code général des collectivités territoriales, que le maire ne peut valablement souscrire un marché au nom de la commune sans y avoir été préalablement autorisé par une délibération expresse du conseil municipal.
La cour précise ensuite les fondements sur lesquels la responsabilité de la commune peut être engagée.
En matière de responsabilité contractuelle, le juge indique que la signature du maire sur les bons de commande et les attestations de factures à payer suffisent à caractériser la conclusion de contrats entre la collectivité et son fournisseur. Il ajoute cependant « que compte tenu de la gravité de l'illégalité commise et des circonstances dans lesquelles le maire a opéré, qui faisaient obstacle à ce que l'assemblée délibérante se prononce en toute connaissance de cause sur ces livraisons à un coût déraisonnable pour n'importe quel consommateur averti, le litige ne peut pas être réglé sur le terrain contractuel et la société ne saurait se prévaloir de l'exigence de loyauté des relations contractuelles ».
En matière de responsabilité quasi-contractuelle et quasi-délictuelle, la cour indique que les marchandises surfacturées, disponibles sur le marché à des prix très inférieurs, ne peuvent pas être regardées comme ayant été utiles à la commune, tout en ajoutant que le fournisseur a lui-même commis une faute en concluant des contrats dont il ne pouvait ignorer l'illégalité.
Ainsi, en dépit de la faute commise par le maire de la commune, la société n'est pas fondée à demander une indemnisation, ni sur le terrain de la responsabilité quasi-contractuelle de la commune, ni sur le terrain quasi-délictuel, car la faute de la société constitue la cause directe de son préjudice.
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