Office du juge du référé précontractuel, choix des critères, respect par le candidat des objectifs fixés par la loi : le Conseil d'État fait le point
Le Conseil d’État, statuant le 23 novembre 2011 en référé dans une affaire portant sur la procédure d’attribution d’un marché de traitement des déchets, a apporté de nombreuses précisions sur le travail d’analyse du juge du référé précontractuel.
Aux termes des articles L. 551-1 et suivants du Code de justice administrative, le juge du référé précontractuel doit examiner si l’entreprise qui le saisit se prévaut de manquements qui sont « susceptibles de l’avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente ». Le fait même de relever une irrégularité dans la procédure ne suffit donc pas à l’annuler si le juge ne constate pas que cette irrégularité est susceptible d’avoir lésé le requérant.
Aucun critère de sélection des offres n’est imposé au pouvoir adjudicateur, la seule obligation qui s’impose à lui est de retenir les critères permettant d’attribuer l’offre la plus avantageuse. Ainsi, le fait de ne pas utiliser un critère portant explicitement sur le développement durable, même dans un marché de traitement des déchets, n’est pas en soit un obstacle au choix de l’offre la mieux-disante. Le juge doit donc contrôler si les critères sont objectifs et « permettent, eu égard à l’objet du marché, de sélectionner l’offre économiquement la plus avantageuse ».
La régularité d’une offre ne s’apprécie pas sur la pratique effective du candidat, mais sur ses éventuelles habilitations, si elles sont nécessaires, et sur ses capacités à fournir les prestations requises. « Si la société Oredui soutient que l’offre de la société Chimirec-Socodeli serait irrégulière, faute pour cette société d’exercer effectivement, alors même qu’elle y est autorisée par arrêté préfectoral, l’activité de traitement des déchets dangereux répondant aux exigences formulées dans les documents de la consultation, il ne résulte pas de l’instruction que cette société ne serait pas en mesure d’assurer les prestations du marché, notamment le traitement des déchets ».
Par ailleurs, la méconnaissance de la législation en vigueur doit être interprétée strictement. Lorsqu’une offre ne méconnaît pas la réglementation en vigueur, et même si elle est moins à même de concourir à la mise en œuvre des objectifs fixés par la réglementation que ses concurrentes, elle ne peut être déclarée inacceptable et éliminée.
Dans le cadre d’une procédure formalisée, la notification du rejet de son offre à un candidat évincé doit comporter les motifs de ce rejet et indiquer la durée du délai de suspension que le pouvoir adjudicateur s’impose (CMP, art. 80). Le fait de transmettre par télécopie aux candidats évincés le classement des offres, ainsi que d’indiquer sur celle-ci un délai de suspension de 11 jours respecte ces dispositions : le motif de rejet se déduit nécessairement du classement des candidats, et le délai est exactement conforme au délai de suspension minimum.
Sources :
- CE, 23 novembre 2011, Communauté urbaine de Nice-Côte d’Azur, n° 351570
- CJA, art. L. 551-1
- CMP, art. 80