Quand monter une association transparente se conclut par une condamnation pénale
La notion d’association administrative transparente a été dégagée par la jurisprudence avec l’arrêt Commune de Boulogne-Billancourt du 21 mars 2007. Dans cet arrêt, le Conseil d’État qualifiait ainsi une association dont l’objet et le budget étaient au service de la ville (en l’espèce, la gestion de la piscine). La commune avait ainsi été substituée à l’association comme responsable des dettes de celle-ci. La chambre criminelle de la Cour de cassation s’est emparée de cette notion dans son arrêt du 7 novembre 2012, dans lequel elle a confirmé la condamnation d’un élu et d’un chef d’entreprise, respectivement pour favoritisme et recel.
Une commune avait lancé un appel d’offres, attribué à une société, puis en avait demandé l’annulation devant le juge administratif. Cette annulation acquise, la même société avait passé un contrat avec une association, portant sur le même objet. Or, l’association a reçu concomitamment une forte subvention de la commune. Après instruction, les juges du fond ont qualifié cette passation déguisée d’attribution d’un avantage injustifié, délit pénal selon les dispositions de l’article 432-14 du Code pénal. Et ont, sur ce fondement, condamné l’élu à une peine « d'un an d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à une amende de 15 000 € et à verser à la partie civile diverses sommes à titre de dommages-intérêts ». La sanction est lourde, mais elle traduit deux choses.
Elle est avant tout une innovation, qui consiste en l’utilisation par le juge pénal de la notion d’association administrative transparente. Cette notion était jusqu’alors employée uniquement par le juge administratif pour engager la responsabilité de la personne publique. Ici, et pour la première fois, c’est à la fois l’organe et le représentant de la personne morale qui est condamné : le maire. La peine doit ainsi être purgée par une personne physique !
Il s’agit d’une conséquence qui rend particulièrement nécessaire de relever le niveau de prudence quant au risque pénal. Le juge pénal s’est en effet fondé sur les données financières de la commune et de l’association. Il en ressortait que le budget de communication de la commune était presque entièrement dévolu à une dotation pour l’association en question. De plus, la présidente de l’association ne prenait aucune décision. Tout concordait pour que le juge qualifie l’association de transparente. Une telle qualification imposait alors le respect du Code des marchés publics. Ne pas le respecter entraîne désormais une condamnation administrative (l’annulation du marché) mais aussi et surtout la condamnation pénale du maire alors en exercice.
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