Référé-provision et conditions d’engagement de la garantie décennale des constructeurs
Par deux décisions rendues le 4 avril 2016, le Conseil d’Etat a eu l’occasion de revenir sur les conditions d’engagement de la responsabilité décennale des constructeurs à la suite de l’exécution d’un marché public de travaux.
Dans chacune des deux affaires, le titulaire du marché s’était fourni auprès de la société Unibéton. À la suite de la survenance de désordres affectant les ouvrages réalisés dans le cadre des marchés, les pouvoirs adjudicateurs avaient alors cherché à obtenir, devant le juge administratif des référés, le versement d’une provision au titre de la réparation des dommages liés à ces désordres.
Or, dans chaque affaire, les juges du fond avaient admis le versement d’une provision à la charge de la société Unibéton. La responsabilité décennale de cette société pouvait être engagée puisque le béton qu’elle avait livré entrait dans la qualification d’élément d’équipement conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l’avance. Il convient effectivement de préciser que l’épaisseur et le dosage du béton fourni par la société Unibéton répondaient aux exigences du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) des marchés. Le matériau semblait donc bien susceptible d’entrer sous cette qualification.
C’était toutefois sans compter sur l’approche opérée par la haute juridiction administrative qui annula les deux ordonnances rendues par les juges administratifs des référés.
En effet, la seule circonstance que le dosage et l’épaisseur du béton avaient été définis par le CCTP n’était pas de nature, en l’absence d’autres circonstances et au regard du fait que ce même béton était commercialisé auprès d’autres maîtres d’ouvrage, à faire rentrer un tel produit dans la catégorie d’élément d’équipement conçu et produit pour satisfaire, en état de service, à des exigences précises et déterminées à l’avance. La responsabilité décennale de la société Unibéton ne pouvant être engagée pour ce seul motif, le bien-fondé des provisions accordées aux pouvoirs adjudicateurs n’était donc plus établi.
Sources :