Vie des marchés
Les acheteurs publics ont de nouvelles règles à respecter pour toutes les procédures lancées depuis le 1er avril 2016. L’entrée en vigueur de l’ordonnance relative aux marchés publics et de son décret d’application, tous les deux instruments de transposition de la directive européenne de 2014, a été le grand sujet de ce premier semestre. Si les textes sont porteurs de nouveautés, les interprétations des services de l’État, et peut-être celles du juge lors du prochain semestre, les font s’approcher dans leur application des règles précédentes.
Le corpus de règles désormais applicable aux marchés publics et aux contrats de partenariat demande aux acheteurs publics de s’adapter dans l’élaboration de leurs procédures.
Avant même de procéder aux mesures de publicité, les acheteurs peuvent désormais recourir au sourcing – ou « études et échanges préalables avec les acheteurs publics » selon la terminologie du décret du 25 mars 2016 – qui est permis, à la condition sine qua non de respecter les principes fondamentaux de la commande publique. L’ambition est de faciliter la formulation des spécifications techniques du marché. Dans ce cadre, les acheteurs pourront faire explicitement référence à des labels ou équivalents, pour ne pas restreindre l’accès à la commande publique.
L’allotissement, qui était déjà un principe dans le Code des marchés publics, conserve une place de poids dans l’ordonnance et le décret. La limitation du nombre de lots susceptibles d’être attribués à un seul candidat est explicitée alors que le droit de déroger à l’allotissement est strictement encadré : la pratique d’attribuer l’ensemble des lots à un seul candidat, aboutissant de facto à un marché global pourrait ainsi se réduire, au bénéfice des petites et moyennes entreprises.
La grande nouveauté en matière d’évolution des procédures ne vient pas du nouveau « code » : le décret du 17 septembre 2015 dispense de procédures de publicité et de mise en concurrence les marchés publics d’un montant inférieur à 25 000 euros hors taxes, sans dispenser l’acheteur d’une bonne gestion des deniers publics néanmoins.
Si cette règle va dans le sens d’une plus grande liberté des acheteurs, le nouveau corpus, et en particulier l’ordonnance, ont renforcé les exigences pesant sur les acheteurs pour les procédures formalisées. En effet, l’article 50 pose le principe d’une attribution au candidat dont l’offre est la plus avantageuse économiquement sur le fondement d’un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l’objet du marché. En découle le renforcement de l’attribution à l’offre dont le cycle de vie économique est le meilleur, en imposant des critères (et sans doute des sous-critères), qui peuvent comprendre des stipulations relatives à l’accessibilité, à l’innovation, au respect du bien-être animal ou de la biodiversité, selon le décret.
Si ces évolutions semblent certaines, elles doivent encore passer au révélateur des interprétations des services de l’État et du juge administratif. Récemment, la règle de non-signature des offres par les candidats, posée par le décret du 25 mars 2016, a fait l’objet d’une interprétation très souple par le ministère de l’Économie. S’il est en principe permis aux candidats de ne pas signer l’offre… il est permis au pouvoir adjudicateur d’y déroger en imposant dans le règlement de consultation ou l’acte de publicité une signature de l’offre !
Bien des référés précontractuels ou des contentieux contractuels, élargis à toute personne y ayant intérêt depuis l’arrêt Département du Tarn-et-Garonne, permettront de préciser les conditions d’applications des nouvelles règles, comme, par exemple, la nouvelle organisation des accords-cadres ou encore la soumission à des règles de droit étrangère en choisissant une centrale d’achat d’un autre pays membre de l’Union européenne.
À (re)lire :
- « La synthèse des contributions sur le projet de décret éclaire les évolutions probables », La lettre Légibase Marchés publics n° 147
- « Dans l’attente du texte définitif, un projet quasi-définitif de décret relatif aux marchés publics a filtré § », La lettre Légibase Marchés publics n° 150
- Le décret relatif aux marchés publics est enfin publié ! », La lettre Légibase Marchés publics n° 151