Un marché exécuté sur différents sites géographiques doit être, a priori, alloti
Par l’arrêt n° 338367 du 23 juillet 2010 « Région Réunion », le Conseil d’État a donné des précisions sur les exigences posées par l’article 10 du Code des marchés publics relatif à l’obligation d’allotir.
L’article 10 du Code des marchés publics pose le principe de l’allotissement et ses exceptions : « Afin de susciter la plus large concurrence, et sauf si l’objet du marché ne permet pas l’identification de prestations distinctes, le pouvoir adjudicateur passe le marché en lots séparés dans les conditions prévues par le III de l’article 27. (…) Le pouvoir adjudicateur peut toutefois passer un marché global, avec ou sans identification de prestations distinctes, s’il estime que la dévolution en lots séparés est de nature, dans le cas particulier, à restreindre la concurrence, ou qu’elle risque de rendre techniquement difficile ou financièrement coûteuse l’exécution des prestations ou encore qu’il n’est pas en mesure d’assurer par lui-même les missions d’organisation, de pilotage et de coordination. »
En l’espèce, la région Réunion a conclu un marché de gardiennage et de surveillance de quatre sites implantés dans quatre villes différentes. À l’issue d’un déféré préfectoral, le tribunal administratif de Saint-Denis a suspendu le marché litigieux. La cour administrative d’appel de Bordeaux a confirmé la position des premiers juges.
En cassation, le Conseil d’État juge que, dans la mesure où le pouvoir adjudicateur « ne justifiait pas se trouver en présence de l’une des exceptions prévues à l’article 10 du Code des marchés publics » (restriction de la concurrence, difficultés techniques, coût particulièrement élevé des prestations ou impossibilité pour le pouvoir adjudicateur d’exécuter les missions d’organisation, de pilotage et de coordination), le marché aurait dû être constitué de prestations non distinctes pour ne pas être soumis au principe posé par le code. Or, la circonstance que le marché fait l’objet d’une répartition géographique entre quatre sites distincts semble caractériser l’existence de prestations distinctes et « est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la signature du marché », qui aurait dû être alloti.
Alors que le Code des marchés publics ne l’évoque pas, le Conseil d’État vient en quelque sorte d’officialiser l’« allotissement géographique », ce qui aurait pour conséquence de nouvelles obligations en termes d’allotissement. Reste à savoir si, au fond, le juge administratif considérera que, dès l’instant que l’exécution d’un marché public est répartie géographiquement, comme tel est le cas en l’espèce, des prestations distinctes doivent être identifiées et le marché alloti.
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