Interdiction d’imposer une forme de groupement avant l’attribution d’un marché public

Par Nicolas Quénard

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Par une réponse ministérielle en date du 12 octobre 2017, le ministère de l’Action et des Comptes publics rappelle que les groupements d’entreprises candidats à l’attribution d’un marché public demeurent libres de soumissionner dans une forme différente de celle indiquée dans les documents de la consultation puisque ce n’est qu’ « après l’attribution du marché public » selon les termes de l’article 45-II du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatifs aux marchés publics que le groupement attributaire est tenu d’adopter la forme de groupement souhaitée par l’acheteur.

En effet, l’article susmentionné définit de manière négative les pouvoirs de l’acheteur en la matière en affirmant qu’il n’est possible à un acheteur d’exiger que les groupements d'opérateurs économiques soumissionnaires adoptent une forme juridique déterminée qu’après l'attribution du marché public et que dans la mesure où cela est nécessaire à sa bonne exécution. Dans ce cas, l'acheteur doit justifier cette exigence dans les documents de la consultation.

S’il convient de souligner que cette mesure n’est pas nouvelle, l’article 51-VII du Code des marchés publics édictant une règle similaire dans sa dernière version abrogée au 1er avril 2016, la réponse ministérielle précise toutefois certains points :

  • en matière de passation :

• devra être considérée comme irrecevable au sens de l’article 55-IV du décret du 25 mars 2016 précité et rejetée sans examen de son offre, une candidature au sein de laquelle le candidat refuse d’emblée et expressément la forme juridique imposée suite à l’attribution du marché public,

• devra être considérée comme irrégulière et rejetée l’offre du titulaire pressenti si ce dernier refuse d’opérer la transformation de la forme juridique du groupement ;

  • en matière d’exécution, le titulaire qui manquerait à son obligation de transformation suite à l’attribution du marché public s’exposerait au risque de se voir opposer une interdiction de soumissionner à de futurs marchés publics.

Ainsi, il est possible :

  • à un acheteur d’exiger des groupements économiques candidats à l’attribution d’un marché public d’adopter une forme juridique déterminée après l’attribution dudit marché, sous réserve que cela soit nécessaire à son exécution et sans toutefois pouvoir exiger qu’ils revêtent cette forme avant l’attribution, soit lors de la phase de candidature ;
  • aux groupements économiques candidats à l’attribution d’un marché public de candidater sous une forme différente de celle requise par l’acheteur après l’attribution du marché public, sous réserve, afin de devenir titulaire du marché public, d’être disposé à modifier la forme dudit groupement.

Sur ce dernier point, la cour administrative d’appel de Nantes a déjà eu l’occasion de censurer une procédure de passation n’ayant pas laissé aux groupements de liberté en la matière, l’acheteur ayant exigé des groupements qu’ils revêtent une forme particulière dès la phase de candidature.

L’intérêt d’une telle mesure consiste à réduire les démarches administratives pour les groupements d’entreprises candidats à l’attribution de marchés publics en permettant à tous les groupements écartés de ne pas avoir à engager inutilement les démarches d’adoption d’une forme particulière de groupement. De par son objectif, cette mesure s’inscrit naturellement dans une démarche de simplification de l’accès aux marchés publics.

Les acheteurs devront donc s’inscrire dans cette veine simplificatrice tout en redoublant de vigilance lors de la rédaction de leurs DCE afin de n’exiger une forme particulière de groupement, en pratique souvent solidaire, qu’après l’attribution du marché et non dès la présentation des candidatures ou des offres.

Sources :