Méthode de notation appliquée aux lots techniques
Un nouvel arrêt du Conseil d'État, en date du 6 avril 2018, est venu rejoindre la liste désormais bien fournie des jurisprudences relatives aux méthodes de notation. Celui-ci est l’occasion de revenir sur la notion de lots techniques, ainsi que sur la manière de procéder à leur analyse.
Les jurisprudences relatives aux méthodes de notation ont cet intérêt d’avoir une portée très pratique, en étant le plus souvent directement transposables dans les pratiques d’achat.
Le principe applicable aux méthodes de notation est énoncé de manière constante par le Conseil d’État (CE, 3 nov. 2014, n° 373362, Commune de Belleville-sur-Loire) : le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu'il a définis et rendus publics.
Toutefois, une méthode de notation est entachée d'irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elle est par elle-même de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et est, de ce fait, susceptible de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre ou, au regard de l'ensemble des critères pondérés, à ce que l'offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie.
De ce point de vue, l’apport du présent arrêt importe plus que les péripéties procédurales qui ont conduit le marché public de travaux du groupement de commandes constitué par l'office public de l'habitat de Bayonne et la société HLM Habitat Sud Atlantic à être examiné à deux reprises par le Conseil d’État.
Ce marché public était décomposé en dix lots techniques, une notion à ne pas confondre avec les lots juridiques de l’article 32 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015. En effet, l’allotissement « juridique » consiste en un principe que l’on pourrait résumer par la formule « un lot = un marché ». Au contraire, l’allotissement technique consiste en la décomposition d’un marché ou d’un lot juridique en plusieurs ensembles de prestations techniques clairement identifiées, laquelle ne fait pas obstacle à la conclusion d'un marché global (CE, 30 juin 2004, n° 261472, Sogea Atlantique et Entreprise des Travaux Publics de l'Ouest).
Dans cette hypothèse, comment procéder à la notation ? Le pouvoir adjudicateur, pour apprécier le critère prix pondéré à 70 %, avait procédé à une notation lot par lot, avant de faire la moyenne arithmétique des différentes notes obtenues pour calculer une note globale. Le Conseil d’État souligne qu’un tel calcul ne permet pas de tenir compte de la grande disparité des valeurs des différents lots ni, par suite, d'identifier l'offre dont le prix était effectivement le plus avantageux.
La méthode de notation est donc irrégulière, et le Conseil d’État précise la marche à suivre : il convient d'appliquer aux notes attribuées aux sociétés candidates pour chaque lot technique, tant au titre du critère du prix que de la valeur technique, un coefficient de pondération tiré du rapport entre la valeur de chaque lot et la valeur estimée de l'ensemble du marché, afin que le calcul de la note globale attribuée aux offres déposées permette de tenir compte de la disparité des valeurs des différents lots techniques constituant le marché faisant l'objet de la procédure d'attribution.
Le Conseil d’État rejette toutefois la demande indemnitaire de la société : l’irrégularité de la méthode de notation employée n’a pas eu d’incidences sur le classement de l’offre du candidat évincé, qui n’aurait en tout état de cause pas remporté le marché.
Il est donc, en conclusion, fortement recommandé de suivre à la lettre la méthodologie du Conseil d’État pour la notation du critère prix dans le cadre d’un marché global décomposé en lots techniques.
Sources :