Illégalité de la sélection d’une variante dans le cadre d’un marché à procédure adaptée
Quand bien même le règlement de la consultation les autorise, et que le marché est passé selon une procédure adaptée avec négociation, les offres variantes ne peuvent être retenues à n’importe quelle condition. Tel est l'enseignement de cet arrêt du 19 juin rendu par la cour administrative d’appel de Bordeaux.
Dans cette affaire, une commune avait, pour la construction d’un complexe sportif, lancé un marché à procédure adaptée avec acceptation des variantes, en application de l’article 50 du Code des marchés publics alors applicable. Le lot n° 2 « terrains sportifs » fut attribué à une société qui, lors du dépôt des candidatures, n’avait remis qu’une offre de base.
Faisant valoir que l’offre retenue était substantiellement modifiée par rapport à l’unique offre présentée initialement par l’attributaire, un candidat évincé a introduit un recours en contestation de validité du marché.
La Cour fait droit à sa demande, tout d’abord en qualifiant de variante l’offre retenue.
En effet, après avoir rappelé que « constituent des "variantes" des modifications, faites à l'initiative des candidats, de spécifications prévues dans la solution de base décrite dans les documents de la consultation » (CE, 5 janv. 2011, n° 343206, Société Technologie Alpine Sécurité), elle précise qu’« une offre qui comporte un procédé d'exécution différent de celui qui est prévu dans le cahier des clauses techniques particulières constitue une variante, même si sa mise en œuvre permettrait la réalisation d'un ouvrage conforme à celui qu'a demandé la personne publique ».
Au cas d’espèce, la Cour relève que la modification apportée par l’attributaire à son offre de base consistait « en la suppression de la couche de fondation », et donc « en un procédé, non de fabrication, mais d'exécution différent de celui qui était prévu » dans le CCTP, de sorte que cette modification était bien qualifiable de variante.
Ensuite, retenant l’argumentaire du candidat évincé et confirmant la solution du juge de première instance, la Cour juge qu’« en examinant puis en retenant cette offre variante alors que [l’attributaire] n'avait présenté qu'une offre de base lors du dépôt de sa candidature, [la commune a] remis en cause les conditions de l'appel à concurrence et méconnu les principes fondamentaux de la commande publique, notamment le principe de l'égalité de traitement entre les candidats. »
En d’autres termes, en dépit de l’autorisation des variantes et de la faculté de négocier offerte en MAPA, le pouvoir adjudicateur ne saurait retenir une offre comportant une modification substantielle à l’offre de base, qui avait seule été remise à l’origine par l’attributaire lors de la remise du dossier de candidature.
La Cour en déduit qu’au regard de sa gravité, ce manquement est « de nature à justifier à lui seul l'annulation du marché en litige », aucune considération d’intérêt général ne pouvant ici y faire obstacle dès lors qu’en raison d’une catastrophe naturelle, les ouvrages réalisés se sont en définitive avérés inutilisables.
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