Le nouveau contrôle de légalité des actes des collectivités

Par Laurent Chomard

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Après la suppression du contrôle de légalité, par la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital, pour les établissements publics de santé, la circulaire du 10 septembre 2010 (NOR IOCB1006399C) vient redéfinir le contrôle de légalité des actes des collectivités et des établissements publics. Dans le cadre de la modernisation du contrôle de légalité, la circulaire du 10 septembre 2010 détaille la nouvelle organisation à mettre en place ainsi que les nouveaux axes prioritaires du contrôle de légalité, et fait le point sur l’obligation de transmission des actes des collectivités et des suites contentieuses pouvant être prises par le préfet.

La modernisation du contrôle de légalité

Suite aux lois de décentralisation reconnaissant aux collectivités locales le principe de libre administration, la tutelle de l’État, représenté par le préfet, a disparu au profit d’un contrôle de légalité a posteriori. Le contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales a un champ d’application limité. Il s'exerce seulement sur certains types d'actes administratifs énumérés dans le Code général des collectivités territoriales (CGCT). Mission confiée aux préfets en vertu de l’article 72 de la Constitution, le contrôle de légalité fait l’objet d’une modernisation dans le cadre de la Révision générale des politiques publiques (RGPP). Cette modernisation passe par la réduction de la liste des actes soumis à transmission, afin de recentrer ce contrôle sur les actes prioritaires, tels que ceux qui concernent la commande publique, l’urbanisme et l’environnement. Initiée par le Conseil de modernisation des politiques publiques, suite au rapport de la mission d’audit sur l’organisation du contrôle de légalité daté de janvier 2007 et mise en œuvre par l'ordonnance n° 2009-1401 du 17 novembre 2009 portant simplification de l'exercice du contrôle de légalité, cette réorganisation a fait l’objet de plusieurs circulaires (circulaires du 24 février 2010 et du 23 juillet 2009). La dernière en date, signée le 10 septembre 2010, porte sur le « contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics en matière de commande publique ».

Une nouvelle organisation du contrôle de légalité d’ici mars 2011

Le contrôle de légalité est désormais centralisé dans les préfectures (circulaire du 23 juillet 2009). Chaque préfecture doit mettre en place, au plus tard le 1er mars 2011, un plan départemental de contrôle. Celui-ci permettra d’établir une stratégie de contrôle adaptée au niveau local. Le plan départemental sera adopté par le préfet en lien avec le trésorier-payeur général et le chef du pôle concurrence, consommation, répression des fraudes et métrologie. Le conseil aux collectivités territoriales en matière de commande publique devient une mission à part entière relevant des préfectures, en amont du contrôle de légalité. Le contrôle de légalité lui-même doit avoir une dimension pédagogique au moyen de lettres d’observation.

Les axes prioritaires du contrôle

Les plans départementaux de contrôle devront respecter un socle commun à l’ensemble des préfectures. Les axes prioritaires du contrôle constituant ce socle sont : 

  • les marchés de travaux à procédure adaptée d’un montant élevé, par exemple supérieur ou égal à 1 000 000 € HT ;
  • les marchés de maîtrise d’œuvre ;les avenants supérieurs à 5 % ;
  • les conventions de délégation de service public ;
  • les contrats de partenariat ;
  • les contrats de prestation intégrée, dits « in house » ;
  • la présence de clauses d’exécution environnementales et sociales de l’article 14 du CMP.

Le schéma de vérification type

Un schéma de vérification type pour les marchés publics est proposé en annexe de la circulaire du 10 septembre 2010, ainsi que des fiches actions permettant d’éclairer le contrôle à chacune des étapes du schéma. Les thèmes abordés par ces fiches permettent au pouvoir adjudicateur d’appréhender les points juridiques qui seront principalement abordés par les contrôles : 

  •  fiche n° 2 : autorité compétente pour signer le marché ;
  • fiche n° 5 : définition des besoins à satisfaire par le pouvoir adjudicateur ;
  • fiche n° 6 : contrats de mandat de maîtrise d’ouvrage et contrats de maîtrise d’œuvre ;
  • fiche n° 7 : choix de la procédure de passation ;
  • fiche n° 8 : mesures de publicité préalables et postérieures à l’attribution du contrat ;
  • fiche n° 9 : réalité de la mise en concurrence préalable ;
  • fiche n° 10 : critères de sélection des offres et motivation des décisions du pouvoir adjudicateur ;
  • fiche n° 12 : composition des commissions ;
  • fiche n° 13 : précision et adéquation des clauses financières ;
  • fiche n° 14 : procédures entre cocontractants (transaction et référé provision).

L’obligation de transmission

En vertu des articles L. 2131-2, L. 3131-2 et L. 4141-2 du CGCT, les conventions relatives aux marchés et aux accords-cadres d’un montant inférieur à un seuil défini par décret, ainsi que les conventions de concession ou d’affermage de services publics locaux et les contrats de partenariat sont transmis au représentant de l’État. Le seuil en question, prévu par l’article D. 2131-5-1 du CGCT, est actuellement de 193 000 € HT, ce qui signifie que les marchés à procédure adaptée de travaux au-dessus de ce seuil doivent être transmis au contrôle de légalité. De plus, le préfet peut, à l’occasion du contrôle sur les délibérations, demander à ce que les conventions correspondantes lui soient transmises au titre du pouvoir d’évocation mentionné à l’article L. 2131-4 du CGCT.

Les suites contentieuses possibles au contrôle de légalité

Le préfet peut saisir le juge administratif d’un référé précontractuel avant la signature d’un marché public lorsqu’il estime que les règles de publicité et de mise en concurrence n’ont pas été respectées. Le représentant de l’État est tenu de notifier son recours au pouvoir adjudicateur (CJA, art. R. 551-1). Le préfet peut aussi saisir le juge administratif d’un référé contractuel mais, comme pour le référé précontractuel, cette procédure ne peut sanctionner que des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Conformément à l’article R. 551-7 du CJA, la juridiction ne peut être saisie que dans les 31 jours suivant la publication d’un avis d’attribution ou dans les six mois en l’absence d’avis. À noter que pour les procédures adaptées, la publication d’un avis d’intention de conclure empêche tout référé contractuel. Pour les actes soumis à l’obligation de transmission, suite à une lettre d’observation infructueuse ayant valeur de recours gracieux, le préfet dispose d’un délai de deux mois à compter de la réception de l’acte pour le déférer au tribunal administratif. Pour les actes non soumis à l’obligation de transmission, le préfet peut aussi demander communication de tout acte de la commande publique, en vertu de l’article L. 2131-3, alinéa 2 du CGCT, et les déférer dans les deux mois de leur communication, à condition que la demande de communication elle-même ait été faite dans les deux mois suivant la date à laquelle l’acte est devenu exécutoire (CGCT, art. L. 2131-3). Le préfet peut, de plus, assortir son déféré d’une demande de suspension automatique du marché, dans les dix jours suivant la réception de l’acte par les services de la préfecture. La demande de suspension du marché au-delà des dix jours n’entraîne pas automaticité de la suspension. Sources :